Vos finances - Tiger21, ou ces grosses fortunes recherchant l’âme soeur

11 mai 2013 | Gérard Bérubé | Finances personnelles

 

John Koloda se donne pour objectif de doubler l’effectif montréalais de Tiger21. Avis aux principaux intéressés : il faut disposer d’un actif prêt à investir d’au moins 10 millions de dollars pour faire partie de cette communauté d’intérêts proposant un milieu d’échanges hautement confidentiel.

 

John Koloda est présenté comme un consultant possédant plus de 30 ans d’expérience en services financiers. Il vient d’être nommé coprésident de la section montréalaise de Tiger21, qui dessert le Québec et l’Est ontarien. Il prévoit l’ajout de deux ou trois nouveaux noms aux huit personnes qui composent présentement l’effectif montréalais, avec pour objectif d’atteindre la vingtaine. Des candidats recrutés un peu partout au Québec et dans la région d’Ottawa. Principal critère d’admission : disposer d’au moins 10 millions prêts à investir, ce qui exclut la résidence principale, et s’engager à être présent aux rencontres pendant deux ans. « De Trois-Rivières à Drummondville et en Beauce, en passant par Québec, Montréal, Gatineau et Ottawa, le bassin de gens fortunés est large. Je vois l’existence d’au moins deux groupes de 20 personnes d’ici une couple d’années », prévoit John Koloda.

 

Lancée aux États-Unis en 1999, Tiger21 est présente au Canada depuis un an. The Investment Group for Enhanced Results in the 21 th Century abrite des groupes dans 12 villes en Amérique du Nord, dont quatre au Canada, et revendique 208 membres affichant collectivement un actif de 19 milliards.

 

Redonner à la société

 

Certaines villes peuvent compter sur la présence de deux ou trois groupes, d’environ 20 personnes chacun. Des entrepreneurs, des gens à la retraite, des personnes actives dans les services financiers ou ayant fait leur fortune dans l’immobilier. Le membre potentiel est convié à une entrevue préalable, ne serait-ce que pour une question d’affinités, pour identifier les traits en commun et sa manière de redonner à la société.

 

Le but de Tiger21 ? Créer une communauté d’intérêts permettant aux gens fortunés de dialoguer entre eux, d’accéder à un milieu confidentiel au sein duquel le multimillionnaire peut échanger avec ses pairs, avec quelqu’un qui comprend ce qu’il vit. « Il peut parler de divorce, de vacances, de dons, de questions familiales et d’autres préoccupations personnelles en toute confiance, dans un environnement ouvert, mais soumis à une règle très stricte de confidentialité », explique John Koloda.

 

Une rencontre mensuelle type débute avec la présentation d’un sujet d’intérêt personnel. On commence avec un tour de table où chaque personne donne son point de vue sur l’état du monde. « Chacun dispose de son propre réseau, de sa propre sphère d’influence. Leur apport est unique. » Le tout est suivi d’une allocution d’un ou de deux conférenciers, un Prix Nobel ou encore un spécialiste abordant un sujet d’investissement unique. En deuxième partie, le membre va présenter son portefeuille et soumettre sa stratégie d’investissement aux commentaires et à la critique objective de ses pairs, chacun misant sur l’expérience ou la vision de chacun.

 

99 vs 1%

 

Et comment le membre de Tiger21 vit-il ce clivage entre les indignés et le 1 % ? Comment répond-il aux doléances des 99 % dénonçant l’écart grandissant des inégalités ? Que pense-t-il des paradis fiscaux et autres mécanismes d’évasion fiscale ? En règle générale, ces gens fortunés « vont se sentir mal compris. Eux aussi peuvent connaître des difficultés ou vivre des expériences malheureuses », retient John Koloda. Ils occupent le palier d’impôt le plus élevé. Ils estiment qu’ils paient trop d’impôts, qu’ils contribuent plus que tout autre, même sur une base relative. Qu’il n’y a donc pas de mal à chercher un moyen d’en payer moins, comme tout contribuable le fait. « Ce sont des gens plus ordinaires qu’on le croit. Ils ne s’enferment pas dans leur bulle et ne se croient pas au-dessus du monde. Ils comprennent ce qui se passe, les difficultés de tous, et y sont sensibles. Ils ne se sentent pas exclus, mais plutôt incompris. Ils ne s’affichent pas en “pauvre de moi”, mais recherchent plutôt les façons de mieux travailler, tous ensemble. »

 

John Koloda observe également que ces gens fortunés redonnent beaucoup à la société. « Ils remettent à la société la plupart du temps de manière anonyme », ajoute-t-il.

 

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Selon le fondateur de Tiger21, Michael Sonnenfeldt, les membres privilégient présentement les placements privés et le marché des actions, quoique ce ne soit pas le « Stampede » pour ces dernières. Ainsi, l’investissement en actions (25 %) et les placements privés (19 %) vont composer le gros du portefeuille moyen, où le niveau des liquidités demeure élevé. Ils fuient les titres obligataires, appréhendant une hausse des taux d’intérêt, et leur principale inquiétude porte sur cet assouplissement monétaire massif qui fait craindre que l’envolée des cours boursiers soit gonflée, sans justification dans l’économie réelle.